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La « démocratie » bourgeoise, un mythe sans frontière

La « démocratie » bourgeoise, un mythe sans frontière

samedi 26 février 2011, par Jean Charles Louvrier


Nous avons été et continuons d’être accoutumés à assister à la ronde incessante des adulateurs de la démocratie bourgeoise. Ils viennent encenser, en terrain conquis, dans tous les média œuvrant à l’assujettissement général, un système de représentations des opinions où chacun serait « libre » de l’usage de la parole et de ses engagements politiques.

Dans l’actualité toute récente, c’est sur le théâtre des événements en Côte d’Ivoire, en Tunisie et en Égypte, que ces courtisans de la classe sociale au pouvoir officient (redécouvrant pour l’occasion des vertus aux opinions de la rue (1)) à redorer le blason d’une politique étrangère mise à mal par des soulèvements populaires. Aux jérémiades politiques de certaines fractions de la bourgeoisie et de la petite bourgeoisie « éclairée » se mêlent, dans un fracas tumultueux, les légitimes revendications économiques de la grande masse des couches sociales déshéritées de ces pays, orphelines d’une véritable représentation de classe pouvant porter la voix.

La mémoire des événements locaux récents semble faire défaut à tous ces flagorneurs ; des centaines de milliers de manifestants déboutés sur la question des réformes des retraites, passage en force pour l’adoption de la constitution européenne, et milles autres questions vitales pour nos vies de travailleurs, prouvent qu’ici aussi c’est sans partage que les classes aisées imposent leur volonté à la masse des ouvriers, travailleurs pauvres, et précaires , et c’est volontairement qu’elles passent sous silence que sans le soutien politique, économique et militaire des grandes puissances impérialistes dont la France(2) , les équipes dirigeantes de ces pays ne se seraient pas maintenues ou n’auraient pas même pu accéder au pouvoir.

L’arnaque intellectuelle du moment chez les plus beaux esprits, bourgeois philosophes, etc. c’est d’applaudir du plat de la main à la mise en chantier de la démocratie bourgeoise dans les pays arabes, poussant ainsi les pions à jouer de leur propre impérialisme ; jurant leurs grands dieux que de tels soulèvements méritent d’être accompagnés de soutiens économiques et politiques. Alors que l’intégrisme islamiste servait à cautionner dans nos opinions publiques des renoncements de « valeurs », il ne sert une fois de plus qu’à poser, sous le couvert d’une morale républicaine pédante, les conditions d’un soutien politique nécessaire et apporté par les grandes banques internationales spoliatrices de tous les peuples.

Le système de démocratie dans les pays capitalistes avancés, occidentaux pour la plupart, repose fondamentalement sur son système économique, c’est par la possession de la banque et l’exportation culturelle de ses « valeurs morales » que la bourgeoisie façonne tous les systèmes de représentation politique, à son service. La multiplication des partis politiques dits de majorité ou d’opposition lui servent la soupe avec comme ingrédient essentielle la reconnaissance marquée ou dissimulée de la toute puissance de son économie de marché.

En Côte d’ivoire, en Tunisie, en Égypte etc. la classe ouvrière, la petite paysannerie pauvre, la grande masse des laissés pour compte, dépourvues des moyens indispensables à une vie décente, ne serait-ce que de parvenir à faire un repas complet par jour, pouvoir abriter décemment ses enfants, avoir une fin de vie qui ne soit pas raccourcie des difficultés à accéder aux soins de santé, etc., cette masse sans voix, voit sa puissance collective diluée parce qu’elle ne peut pas assurer les moyens matériels de son expression politique propre. Elle est donc réduite à se prononcer, en déléguant, sur des programmes qui lui sont présentés comme autant de réformes plus ou moins radicales destinées à soulager leurs souffrances sociales (3) sans jamais les guérir vraiment.

"La démocratie, la liberté, l’Etat de droit ! C’est un choix", affirment et écrivent les « puristes démocrates », journalistes, chroniqueurs, écrivains, juristes, etc. « Oui » mais ! C’est celui de leur classe et il repose sur le droit constitutionnellement établi d’exploiter par le travail les classes sociales les plus démunies ! Les alternatives politiques juridiquement acceptables se limitent aux seules options qui ne trahissent pas ce droit.

Dans la société divisée en classes sociales, il ne peut exister de système démocratique donnant satisfaction sociale, économique et politique à l’ensemble, les intérêts des unes et des autres s’opposant naturellement, car :

- entre rentiers et prolétaires, c’est nécessairement la force de travail des seconds qui remplit les coffres des premiers, contre la seule garantie de recevoir de quoi renouveler cette force dans des conditions géographiques inégalitaires.
- entre un employeur licencieur et les travailleurs, ses victimes, il n’y aura jamais communauté d’intérêts.
- entre le travailleur sans papier, exilé économique et son négrier « anonyme » il n’y aura jamais égalité devant la loi, que le second se taille sur mesure.
- entre un bailleur expulseur et ses locataires, plus ou moins mal logés, le sans abri à la recherche d’un toit, il n’y aura jamais égalités de droit ; le sacro-saint droit de la propriété privée déclassant celui du respect de la personne humaine.
- entre la femme bourgeoise employeur et la femme de ménage, sa domestique, son ouvrière, la revendication généraliste des droits de la femme ne sera jamais celle de l’émancipation intégrale de la femme ouvrière.
- entre un bourgeois repus et un homme, une femme précaire, vivant de quasi mendicité, il n’y aura jamais place à la même table.
- entre un jeune des quartiers populaires totalement sans ressources et un jeune bourgeois argenté promis à un bel avenir, il n’y aura jamais communauté de destin, etc. etc. Etc.

Ainsi, nécessairement, de toutes époques, la revendication démocratique dans ses rédactions imprime la domination d’une classe sur une autre. Le système démocratique bourgeois fait la part belle, par la loi, à la défense des intérêts de cette classe minoritaire, fondant sa « légitimité » en étouffant les aspirations à l’émancipation politique et économique de la grande majorité des couches populaires dépossédées.

Il n’y a pas d’Etat au dessus des classes, il est toujours celui de la classe au pouvoir (4).

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1 « Suivant la formule que l’on doit au premier ministre JP Raffarin « La rue doit s’exprimer mais ce n’est pas la rue qui gouverne »…
2 Puissances impérialistes aujourd’hui à la manœuvre partout dans le monde, face à la crise d’un nouveau redécoupage de leurs zones d’influences.
3 Voir notre programme « L’organisation politique de la bourgeoisie et son système « démocratique » ».
4 Idem




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